La crise que nous connaissons a entraîné de nombreuses annulations de voyages et vacances, en Belgique comme à l’étranger. Ce n’est certes pas la conséquence la plus grave, mais la question que le consommateur se pose légitimement porte sur ses droits vis-à-vis de l’organisateur du voyage. Peut-il demander un remboursement des frais engagés ou doit-il accepter le bon à valoir ou voucher que lui propose l’organisateur ?

 

Le remboursement ou un voucher ?

D’un point de vue économique, le voucher a évidemment la préférence de l’organisateur, lui aussi durement frappé par les mesures de confinement et l’interdiction des voyages. Délivrer un voucher évite le remboursement des sommes déjà versées et permet de fidéliser le client, qui ne fait donc, bon gré mal gré, que postposer son voyage. Cette solution ne correspond pas pour autant aux intérêts du client, qui peut préférer retrouver sa liberté et son argent.
Mais qu’en est-il d’un point de vue juridique ? On a assisté, sur cette question, à une intervention caractérisée par une volte-face de la ministre de l’économie, un premier arrêté ministériel devant être corrigé par un second quelques jours plus tard. Le problème lié à la résiliation des contrats de voyage illustre bien la difficulté de maintenir le pot droit et de concilier des intérêts apparemment contradictoires.

 

Soutenir les professionnels du tourisme

Dans un premier temps, sensible aux problèmes rencontrés par certains secteurs économiques – ce qui, après tout, relève de ses compétences – et soucieuse de protéger les entreprises de voyages, la ministre, dans un arrêté du 19 mars 2020 (Moniteur belge, 20/03/20), a décidé que l’organisateur, en cas de résiliation du voyage, serait en droit de délivrer au voyageur un bon à valoir au lieu d’un remboursement. L’arrêté précise bien que « le voyageur ne peut pas refuser le bon à valoir ».
Ce bon, d’une valeur égale au montant déjà payé, d’une validité d’au moins un an, doit être délivré sans frais pour le voyageur et indiquer qu’il est délivré « à la suite de la crise du coronavirus ».
Le client ne peut donc pas invoquer ses propres difficultés financières et exiger le remboursement des sommes déjà payées – on pense particulièrement aux réservations collectives faites par les mouvements de jeunesse ou les établissements scolaires, pour des montants non négligeables.
C’est ce dernier élément qui a provoqué la polémique, beaucoup de clients, confrontés à la difficulté de prévoir leurs vacances ou poussés par des raisons financières, préférant obtenir un remboursement.
Il faut noter que la peur de l’insolvabilité de l’organisateur a été rencontrée : l’arrêté ministériel du 19 mars dispose que l’assurance contre l’insolvabilité des organisateurs de voyage – imposée par l’arrêté royal du 29 mai 2018 (M.B., 11/06/18) – couvre le remboursement des bons à valoir en question. La faillite de l’organisateur qui a délivré le bon à valoir ne devrait donc pas entraîner de perte pour le client.

 

Protéger les consommateurs

Mais la ministre a dû changer son fusil d’épaule, suite à l’intervention du commissaire européen en charge de la protection des consommateurs, car un arrêté ministériel modificatif a été pris le 3 avril 2020 (M.B., 04/04/20). Le commissaire européen, certes sensible aux difficultés du secteur du voyage, a néanmoins rappelé que l’utilisation de bons à valoir était possible, mais à condition que ces bons soient remboursables.
Dans l’arrêté du 3 avril, la correction est donc importante puisqu’il est précisé que « le bon à valoir qui n’est pas utilisé par le voyageur endéans le délai d’un an après son émission est remboursé à sa demande ».

 

Une solution de compromis

Concrètement, en cas d’annulation du voyage, si le client demande le remboursement immédiat des sommes versées, l’organisateur peut refuser cette demande et délivrer un bon à valoir d’une valeur égale, qui pourra être utilisé dans un délai d’au moins une année.
Si le client n’utilise pas ce bon dans l’année, il pourra en demander le remboursement. Le deuxième arrêté donne cependant un délai de six mois à l’organisateur pour faire ce remboursement.

La solution ainsi dégagée est un compromis entre les droits de chacun. Elle donne un bol d’air à l’organisateur de voyages, sans pénaliser financièrement le client, qui pourra récupérer son argent, même s’il doit faire preuve de patience. Espérons que la sortie de crise puisse s’effectuer dans de bonnes conditions et, surtout, dans les meilleurs délais.

 

Pour le cabinet Derenne & Associés,

René Robaye


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